Pourquoi on ne dit pas "Journée de LA Femme" #8mars

Journée Internationale des Femmes
C'est une question qui m'anime tous les jours et encore plus à l'approche du 8 mars quand chacun-e y va de sa réflexion personnelle, médiatique ou journalistique.

Comme le dit Olympe:
"Rien à faire, la plupart de ceux qui organisent quelque chose parlent de la journée de LA femme, comme si nous étions toutes résumables au fait d'être femme."
C'est aussi comme si toutes les femmes n'étaient en fait qu'une espèce d'entité singulière répondant à des vertus qui lui sont spécifiques.
Et c'est précisément le contraire.
Les femmes ne sont pas UNE mais DES femmes. Toutes différentes, avec des luttes plus ou moins avancées selon les pays, selon le contexte.

Les femmes sont multiples.
Exactement comme le sont les hommes.

User de l'archétype singulier "LA femme", c'est nier cette multiplicité.

Les Droits de l'Homme sont ceux du genre humain qui inclut hommes et femmes dans leur multiplicité. L'usage du singulier ne pose donc absolument aucun problème linguistique ou sémantique. On parle d'ailleurs de Human Rights en anglais et non pas de Men's Rights pour désigner ce que nous, nous appelons les Droits de l'Homme. 

Mais, il va de soi que si "une journée (des droits) des hommes" existait, il ne nous viendrait pas à l'esprit de parler de la "journée des droits de l'homme" car tout le monde assimilerait - à juste titre - cette journée à celle des Human Rights.

Je sens déjà poindre les commentaires de mes lecteurs réacs qui vont me dire qu'il faut pétitionner pour "une journée (des droits) des hommes" et je leur répondrai qu'ils en ont déjà 364, sans compter les siècles passés.
Bref.

Donc si on suit cette logique, il n'y a aucune raison valable pour singulariser cette journée en la réduisant à LA femme, un peu comme à une époque pas si lointaine où Moulinex libérait LA femme.

De même qu'il ne nous viendrait pas à l'esprit de parler des droits:
  • DU handicapé
  • DE L'étudiant
  • DE L'homosexuel
  • DE L'immigré
  • DU Noir, DE L'Arabe, DU Juif
  • DU sénior
...etc.

Alors même si la langue française a officialisé l'usage du singulier pour la journée du 8 mars, on ne peut que regretter une lourde maladresse de traduction car ce que l'ONU ou l'UNESCO appellent "International Women's Day" est bien la Journée Internationale DES femmes et non pas de la femme.

Et pas besoin d'être un crack en anglais pour savoir que WOMEN veut dire FEMMES au pluriel.

Quant à l'Histoire de cette journée, l'idée est née à Copenhague en 1910 à la deuxième conférence de l'Internationale Socialiste des Femmes, et on parlait alors bien d'une "journée internationale des femmes".

Et quand on va sur Wikipédia, on remarque que l'expression est toujours au pluriel sauf:
  • dans le titre
  • dans la section "thème des journées" où subitement entre 2011 et 2012 on passe du pluriel au singulier.
  • dans le paragraphe qui explique l'internationalisation et l'officialisation de la journée
Et dans ce dernier passage, on peut lire: 
"Le 8 mars 1947, Léon Blum salue la place importante des femmes dans la Résistance. Dans les années 1960, les avancées du féminisme et la révolution sexuelle aidant, l’image des femmes change à l’Ouest, la journée de Droits des Femmes plutôt que celle de la Mère fait son chemin et rend largement acceptable [...] la célébration de l’égalité des droits hommes-femmes. [...] Le 8 mars 1977, l’Organisation des Nations unies adopte une résolution enjoignant ses pays membres à célébrer une "Journée des Nations unies pour les droits de la femme et la paix internationale" plus communément appelée par l'ONU "Journée internationale de la femme".
"Le passage du pluriel au singulier est révélateur des divergences entre la conception socialiste-féministe et la conception onusienne. En faisant disparaître les femmes en tant que groupe social au profit de la femme comme genre, l'organisation internationale tente de gommer la dimension conflictuelle de l'événement d'origine. Le 8 mars 1982, le gouvernement socialiste de François Mitterrand donne un statut officiel à la journée en France".
Conception socialiste des femmes = groupe social.
Conception onusienne des femmes = sexe biologique.

Tout est dit je crois.

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36 commentaires

  1. Je pense qu'Olympe et vous avez tort ; en tout cas pas entièrement raison. Les femmes sont certes des mais elles sont aussi la femme – et c'est la même chose pour les hommes. Cela, ce singulier, est là pour mettre en relief ce que nous avons en commun ; ce qui reste une fois que l'on a apuré toutes les différences, plus ou moins de surface. Mais cela n'implique en aucun cas que nous soyons tous pareils.

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    1. nous ne sommes pas tous pareils, loin de moi cette idée.
      Ceci dit, je reste convaincue que le pluriel est indispensable si on ne veut pas tomber dans le réducteur.

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    2. ça me fait chier d'avouer que je partage l'avis de DidierGoux. la singularise une identité plurielle.

      la unifie et consolide le mot femme. Exemple courant: "les solutions" a moins d'impact que "LA solution!". C'est comme définir une réference et une seule, unité de la femme quelque soit ses origines, son genre, sa religion etc...

      Enfin, je pense...

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    3. C'est un vaste débat! Il n'y a donc pas de mal à être d'accord avec Didier Goux!
      Sauf qu'on utilise l'expression LA solution quand il n'y a qu'UNE seule solution.
      Ce qui n'est pas le cas pour LES femmes.
      Et pour ma part, je ne suis pas d'accord avec toi quand tu dis que "LA" sert aussi à "définir une réference et une seule, unité de la femme quelque soit ses origines, son genre, sa religion"
      Car il n'y a pas d'unité de la femme.

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    4. Les masculinistes et leurs affidés précédents ont intérêt à maintenir la confusion : la fâme, c'est une créature mi vampire, mi-garce qui fait peur aux petits et aux grands garçons avec son vagin denté ; lome, (pardon Lome) c'est l'universel de l'espèce humaine, un concept assez bidon et plutôt spéciste, donc rien à voir. La fâme, c'est la femme essentielle qui n'existe que dans leur imagination et qui nie la diversité deS femmeS qu'ils n'aime(nt) pas. Ils n'aiment pas la diversité d'ailleurs, d'où qu'elle vienne : ils s'aiment entre eux, d'où leurs clubs, leur entre-soi masculin, ils en arrivent même à se reproduire entre eux : l'académie française, les deux chambres sénat et AN, les clubs francs-maçons, leurs confréries de mangeurs de boudins,etc... Très bien, ton billet ;)

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    5. Clara Zetkin a créé la Journée internationale des femmes.
      Sur ce film des années 20, une manifestation pour le 8 mars à Vienne (Autriche). On constate que pour le mouvement ouvrier à l'époque le 8 mars était une date aussi importante que le 1er mai (fête des travailleurs et non du travail lol) . la banderole proclame "Vive la Journée internationale DES femmes" Bertrand
      http://www.youtube.com/watch?v=yf5CzlcPlJE

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    6. Oui! Et les sources ne manquent pas...

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  2. "La femme", c'est une métonymie. Les figures de style, c'est très joli en littérature et en poésie, mais utilisé dans le langage courant, c'est un abus de langage, qui vise surtout à circonscrire l'objet, et donc en avoir une vision très réductrice. Je partage tout à fait ce qui est écrit ici.
    Dire "La" femme, c'est parler de quelque chose qui n'existe pas. Je disais hier sur Twitter, c'est un peu comme parler de la journée de la licorne... Ou alors, c'est parler d'un être par son plus petit dénominateur commun. un vagin, une paire de seins, maternité, et son lot de clichés que cette "journée" est sensée combattre.

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    1. voilà c'est précisément ce que je voulais (aurais dû) dire aussi.

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    2. Personnellement , je la sacralise avec LA. Peut être un fait culturel: LES Mama africa. par exemple, on les trouve partout, LA Mama Africa est une distinction hautement symbolique. (Myriam Makeba par exemple) et, à travers ELLE, le respect dû à TOUTES les femmes.

      PS: Je suis content de partager l'avis de DGoux ;-)

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    3. OK. Je crois comprendre ce que tu veux dire.
      Sauf que (oui je suis pugnace) LA femme n'est ni quelque chose de sacré ni une distinction.
      Et le 8 mars n'a jamais eu pour vocation de sacraliser LA femme.

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    4. Mais si, on est tous le fruit d'une matrice sacrée...

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  3. Tiens, je suis d'accord avec Didier Goux aussi
    Veux-tu empêcher d'idéaliser l'absolu féminin? ce serait dommage...
    http://plume-ecran.blogspot.fr/2013/03/aragon-pour-un-8-mars.html

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    1. Mais "l'absolu féminin", ça ne veut rien dire... C'est une notion essentialiste, comme s'il existait un absolu masculin. Définir un absolu, c'est définir une norme, et on devrait se battre contre ça.

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    2. C'est ce qui fait qu'un homme aime sa femme et qu'une femme aime son homme, mais bon, s'il n'y a plus de place pour le romantisme et l'amour entre les hommes et les femmes, c'est pas ce monde-là dont j'ai envie, moi.
      Pourquoi s'aimer alors, si ce n'est pas chercher en l'autre un absolu, un idéal, et trouver dans ses yeux ce même absolu, et ce respect profond qui existe dans un couple uni, égal et fusionnel?
      Des fois, je ne comprend pas. Vouloir toujours opposer, s'insurger, même sur de belles raisons...je ne suis pas, vraiment.
      En toute personne, il existe ce besoin d'absolu, de dépassement, dans le sexe opposé, il existe cette fascination de l'autre qui n'est pas tout à fait soi mais qui est si proche pourtant...pourquoi tout gâcher avec des luttes?
      Un côté revanchard, revendicatif, absolument, comme si la femme était infériorisée, de toute manière?
      Désolée mais je ne suis pas. Il y a des limites à tout. Et là, ce sont mes limites. Alors je vais me faire pourrir la tête mais je crois que revendiquer, à ce niveau, même dans la poésie et le romantisme, cela me dépasse.
      Enlever ce qu'il y a de beau dans l'amour entre un homme et une femme...
      Et en quoi cela va aider les opprimées?

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    3. Tout ceci déborde de bon sentiments et de bisounourserie. Et c'est tant mieux.
      Moi aussi je ressens des trucs comme ça vis à vis de la personne qui partage ma vie et c'est tant mieux.
      Mais cela n'a absolument rien à voir avec avec la journée du 8 mars. Je ne vois pas du tout le rapport avec le singulier ou le pluriel des femmes.

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  4. "idéaliser l'absolu féminin"?
    C'est quoi?
    Et je ne crois pas que ce soit le but de la journée du 8 mars hein...

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  5. Merci pour cette piqure de rappel ! On ne le répétera jamais assez : c’est une journée de lutte, des femmes, pour l’égalité des droits.

    Merci pour ces précisions sur le singulier/pluriel de l'appellation relativement au point de vue onusien. Acceptez-vous que vos précisions viennent complèter cette page sur l'officialisation par les Nations Unies : http://8mars.info/les-nations-unies-officialisent-la-journee ?

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  6. Vaste débat...Mais il faut se rappeler d'où on vient...Une journée internationale avait été mise en place car il fallait affirmer en effet que les femmes n'étaient pas uniquement des "ménagères", mais des êtres humains à part entière...Une conception qui bousculait complètement l'approche judéo-chrétienne de la place de la femme dans nos sociétés occidentales...Il faut se rappeler également que les femmes n'ont eu le droit de vote en France qu'en 1945, alors que par exemple en Turquie ce droit existait depuis bien longtemps avant...
    Je travaille actuellement sur les archives de mon union départementale CGT...Dans les années 50, une décision de mettre en place une commission des "femmes travailleuses" avait été prise, décision qui ne semble pas avoir été suivie d'effet, ce qui ne m'étonne pas compte tenu des mentalités de l'époque...
    Alors bien sûr, la sémantique n'est pas neutre...Mais est-ce que la vraie question que l'on devrait se poser ne résiderait-elle pas dans la formulation suivante " pourquoi faire une journée spécifique sur les droits des femmes, alors que ce sont les droits de tous les êtres humains qui sont menacés ?" C'est tous les jours que les droits fondamentaux des êtres humains devraient tenir le haut du pavé !

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    1. Dans l'absolu, tu as évidemment raison.
      Personnellement, je prends cette journée comme une occasion de me rappeler et de rappeler aux autres que rien n'est acquis.
      Et je fais pareil, à la hauteur de mes modeste moyens, avec les autres journées internationales de... Et les autres droits fondamentaux comme tu dis.

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    2. A savoir : l'étymologie de "manager" est "ménagère", afin de signifier "bonne gestion".
      ;-)

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    3. intéressant tiens.
      Z'avez un nom Anonyme ou pas?

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  7. entièrement d'accord !

    On ne dit pas "la fête de la secrétaire", mais "la fête des secrétaires", on ne dit pas "la fête de la grand-mère", mais "la fête des grands-mères". Avec la "fête du père" et la "fête de la mère", les vide-poches en boîte de camembert et colliers sertis de nouilles prennent tout à coup une allure étrange.

    Dire "la journée de la femme" comme "la journée du chocolat" ou "la journée du cheval", c'est réduire les femmes à être une matière ou une chose : "la femme" comme "le chocolat" ou "le cheval".

    Dire "les femmes" au pluriel c'est parler de toutes les femmes et accepter leur diversité. C'est aussi ringardiser LA femme, celle que les machistes célèbrent, que les cons vénèrent et que la publicité impose, la femme idéale, celle qui n'existe pas, celle à laquelle ne ressembleront jamais les femmes que nous cotoyons, bien réelles, en chair et en os, avec des bourrelets, des rides, des rires pas toujours très fins et même un peu de gras sur le bide... un peu comme les hommes.

    Bise

    Lionel

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    1. Bises à vous aussi Lionel et merci pour ces précisions!

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    2. Un cheval n'est pas un objet -_-" et aucun cheval n'est semblable à l'autre, comme nous (êtres humains) ils ont tous un caractere unique :P

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  8. est-ce que il y a une Journée des hommes?on ne parle que des pauvres femmes..non égales aux hommes...et les hommes,eux..si il y a divorce par exemple,qui garde la maison,et le terrain??devinez!!??et qui demande en plus une pension alimentaire??:devinez?(meme sans enfant...)parce que ces femmes ne veulent pas travailler!!..et si enfants,certaines refusent que le papa voit ses enfants...p'tite vengeance?...je connais pleins d'hommes en détresse,EGALITÉ?.Ghislaine.

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    1. Salut Gigi,
      Il y a égalité en la matière : Une femme qui divorce d'un homme doit lui maintenir le même niveau de vie que pendant le mariage si c'est elle qui ramène le plus gros revenu.
      L'inégalité n'est pas dans les pensions alimentaires versées par les hommes aux femmes, elle est dans le fait que, la plupart du temps, les revenus des femmes sont inférieurs à ceux des hommes.
      Cela entraîne d'ailleurs des conséquence très intéressantes dont celle-ci : quand le troisième enfant arrive, il arrive souvent que l'un des conjoints s'arrête de travailler car les gardes des enfants coûtent cher. Logique comptable oblige, c'est le parent qui a le moindre salaire qui s'arrête, sacrifiant au passage ses possibles évolutions de carrière : Bingo, c'est le souvent la femme.
      Bien cordialement,
      Lionel

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    2. C'est précisément ce qu'a raconté Roselyne Bachelot hier au Grand Journal.
      Merci Lionel

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