Le confinement, c'est maintenant.
Mon iPhone sait désormais écrire tout seul les mots "confinement" et "Coronavirus" même quand je suis pompette ou quand j'ai deux mains gauches.
Je n'ose pas appeler ce billet "Journal du Confinement. Jour 1" parce que ça voudrait dire que j'ai la prétention d’être capable d'écrire tous les jours.
J'ai déjà du mal à écrire sur ce blog autant que je le souhaiterais. Alors quotidiennement, ça me semble carrément illusoire.
Il n'empêche (ça, c'est en dédicace à Nicolas. Il écrit toujours "il n'empêche". Il ne le dit jamais, mais il l’écrit tout le temps), quand tu as what1000 amis et / ou what1000 amants et que, du jour au lendemain, tu te retrouves confinée dans ton 2 pièces en banlieue avec ton chat qui te lance des regards assassins en mode « pardon mais tu vas squatter là jour et nuit ? C’est ça l’idée ? » Bah ça fait un peu chelou.
Cela dit, ça fait que 2 jours hein. 2 jours de télétravail, c’est pas comme si ça ne m’était jamais arrivé. C’est plutôt l’idée du confinement et tout ce qui va avec qui est chelou.
C’est comme si le 1er tour des Municipales avait eu lieu il y a 3 semaines. Comme si l’affaire des sextos de Griveaux, c’était il y 3 a mois. Comme si le 1er cas de Coronavirus en Chine était il y a 6 mois.
Tout va très vite et très lentement à la fois.
On a vu des gens se jeter sur des rouleaux de PQ et des paquets de pâtes. À croire que les gens vont se faire des lasagnes au PQ ou du gratin de PQ.
On comprend pas bien la logique. L’instinct de survie sans doute.
On a vu un Président de la République prendre la parole 2 fois en 4 jours. Idem pour le Premier Ministre. Idem pour le Ministre de l’Intérieur. À chaque prise de parole, on en rajoute une couche.
Mais les gens ne comprennent toujours pas que :
- Non, ça ne sert à rien de bâtir des châteaux forts en PQ.
- Non, ça ne sert à rien de stocker du Doliprane en quantité astronomique.
- Non, il ne faut pas rester collés les uns aux autres en faisant ses courses, en allant au marché ou en faisant la queue je sais pas où.
- Non, on ne peut pas « juste prendre l’air » comme ça l’air de rien (tu l’as ?)
- Oui, c’est complètement con de se jeter par milliers dans le même TGV pour se confiner « en région ».
- Oui c’est égoïste de remplir son chariot vers l’infini et au-delà de ce qu’il peut contenir. En vrai, même si j’avais eu envie de stocker du PQ jusqu’à pouvoir m’en faire un sarcophage, je n’aurais pas pu, je n’ai pas la place [Insérer ici l’insulte de votre choix].
- Oui, si vous voulez sauver des vies, il faut rester chez vous.
- Non, même si c'était une belle journée vendredi, ça n'arrivera plus jusqu'à nouvel ordre.
- Oui, c'était une connerie ce karaoké vendredi soir.
Du sommet de l’Etat à la rue d’à côté, du Président au fleuriste qui refuse de fermer, en passant par les kékés qui ont envahi parcs et jardins toute la journée de dimanche, on aura tout eu.
Ils nous auront tout fait.
Moi, dimanche, j’ai fêté l’anniversaire de mon neveu chez ma sœur. Avant d’y aller, j’ai appris à ma mère à se servir de la visio sur WhatsApp. Bah oui. Ma mère a plus de 70 ans. Donc elle n’est pas venue. C’est la première fois qu’elle manque un anniversaire. Elle a trinqué avec nous, à distance. Et elle a soufflé les bougies avec nous, à distance aussi.
C’était étrange. Et triste à la fois.
Chez ma sœur, on est tous restés à plus d’un mètre de distance. On se lavait les mains toutes les 5 minutes. Et on s’est quittés très tôt. On s’est jamais quittés aussi tôt d’ailleurs. On s’est pas embrassés. Ça non plus, ça n’était jamais arrivé.
Pendant ce temps-là, des gens votaient, à leurs risques et périls, et d’autres se doraient la pilule par grappe de cent dans les jardins publics, à leurs risques et périls. Et aux nôtres aussi.
Lundi, sur les réseaux sociaux, on faisait tous les malins avec notre télétravail.
Voilà mon bureau jusqu’à nouvel ordre ! »« Petite pause déj sympatoche sur mon balcon ! »« J’ai jamais autant bossé que ce lundi !
Mardi, aujourd’hui, c’était le jour d’après.
Le jour du confinement officieux devenu officiel.
On faisait moins les malins.
Au petit dèj, j’ai lu le texte de Seb. Il m’a arraché des larmes, ce ptit con.
Dans la matinée, j’ai appelé l’Etablissement Français du Sang. Je donne mes plaquettes depuis plusieurs années. J’avais calé un rendez-vous pour mardi prochain. Mais comme je ne sais pas dans quel état je serai mardi prochain, je l’ai avancé à aujourd’hui. Donner son sang ou ses plaquettes, ça fait partie des sorties autorisées. Comme ça, dans un mois, je pourrai les redonner à nouveau. Ils sont à sec et craignent une pénurie.
Une vraie pénurie hein. Une pénurie de sang. Pas une pénurie de PQ ou de nouilles. On parle d’un autre délire, là.
J’ai racheté une cartouche de clopes. Alors que j’avais quasiment arrêté de fumer. Ne me demandez pas pourquoi, ma réponse n’aurait ni queue ni tête.
(Mutti, si tu me lis, ne dis rien…)
Sur les réseaux sociaux, on continue à lire et voir des comportements irrationnels de gens qui paniquent et ne pensent qu’à eux. Ça doit être ça la sélection naturelle. Ça me donne envie de me poster dans un coin pas loin d’un supermarché et de jeter des cailloux à tous ceux qui remplissent leurs caddies jusqu’à ce qu’ils vomissent du PQ et des spaghettis.
Ce soir, c’est Nico qui a écrit un petit billet sur son jour 1 du confinement. Lui aussi, il a failli me faire chialer.
Au même moment, dans plusieurs grandes villes, les gens s’étaient donné rendez-vous à distance pour faire du bruit et applaudir nos personnels soignants.
Il paraît qu’on va faire ça tous les soirs. C’est bien. C’est beau. Ça fait un peu chialer aussi mais ça fait du bien de se dire qu’il reste encore du bon dans la race humaine.
Autour du parc des épinettes à Paris #OnApplaudit également et ça sera encore plus fort demain ✊🏼 pic.twitter.com/CUyhb7gyrz— Mehdi Mebarki (@MehdiYanis) March 17, 2020
D’ailleurs, il reste vraiment du bon dans la race humaine. Il reste l’humour.
Les réseaux sociaux débordent, autant que les caddies plein de PQ, de vidéos, visuels et autres montages hyper drôles sur le confinement.
Alors, chacun chez soi, on les regarde et on rigole.
Et comme on les trouve hyper drôles, on les partage avec les potes.
Et tout le monde rigole.
Chacun chez soi.
Alors finalement, on s’appelle, et on rigole de vive voix.
Chacun chez soi.
Et comme on les trouve hyper drôles, on les partage avec les potes.
Et tout le monde rigole.
Chacun chez soi.
Alors finalement, on s’appelle, et on rigole de vive voix.
Chacun chez soi.
Et puis, parce qu’au bout d’un moment, on se dit que les sms, les mails et les WhatsApp, ça fait mal aux doigts et aux mains, alors on finit par se caler des apéros virtuels, sur Skype ou sur Hangout.
Tout en restant chacun chez soi.
6 commentaires
Beau billet. Ce qui me fait rire. N’est qu’au bistro d’à côté du bureau il y avait vraiment karaoké vendredi. J’ai trouvé ça délirant. Je suis resté à l’autre bout du comptoir.
RépondreSupprimerMoi j’étais chez une pote. Avec 4 autres potes. Et on a fait les cons. Avec un micro de karaoké. J’sais pas pourquoi...
SupprimerC'est intéressant, ce que vous dites de la distorsion du temps pour cause de confinement. Ça rejoint plus ou moins ce que disait Varlam Chalamov qui, dans ses Récits de la Kolyma, notait que, au goulag, les journées étaient interminables mais que les années passaient très vite.
RépondreSupprimerSinon, pour parler plus personnellement, menant déjà, par goût, une vie confinée depuis plus de trois ans, j'ai peine à voir la différence. Ah si, une quand même : désormais, quand je décide d'aller arpenter les chemins déserts avec Charlus, je dis à Catherine que je vais "déconfiner le chien", car "promener" me semble terriblement has been
Voilà.
À part ça, l'initiative consistant à se "réunir à distance" pour faire du bruit me consterne violemment… sans m'étonner tout à fait.
SupprimerOui, je sais : je suis prévisible…
Supprimer"Déconfiner le chien", ça mérite un copyright, je dois bien le reconnaître.
SupprimerPar contre, si vous rédigez mes réponses à ma place, que vais-je donc bien pouvoir dire à part "Que vous êtes prévisible" ?