Lectures estivales

Comme je suis une feignasse sur ce blog et que je n'ai rien à raconter de chaud bouillant, je vais vous servir un repas froid : celui de mes lectures estivales.
Et comme je suis une double feignasse, je vais partager ici mes lectures déjà partagées ailleurs sur mes réseaux sociaux.
Bon appétit et bonnes lectures !

La petite communiste qui ne souriait jamais, de Lola Lafon


Fascinant destin que celui de Nadia Comăneci, la petite fille communiste qui ne souriait jamais, adorée, adulée, martyrisée, "dressée", critiquée, poursuivie, harcelée, méprisée, accusée, utilisée, médaillée, encensée, oubliée, réhabilitée, exilée… en pleine guerre froide, en pleine dictature roumaine sous Nicolae Ceaușescu.
Formidable travail de biographie que celui réalisé par Lola Lafon, en correspondance permanente avec "Nadia C.", parfois bienveillante, parfois accrochée, souvent en désaccord sur la perception qu’elles avaient l’une et l’autre du Bloc de l’Est, de la dictature communiste et de l’image du peuple roumain pendant cette période si particulière.

Les enfants de la nuit, d'Eva Ionesco


Bouleversant témoignage que celui d’Eva Ionesco qui revient sur la fin de son enfance et le début de son adolescence, chahutée, abusée, détournée, mal-aimée, sur ses nuits parisiennes entourées de ses amis et amies, des night-clubs les plus tendance de l’époque, aux bouges les plus crades.
Une lecture longue et pénible, en mouvement perpétuel, jamais posée, la lecture essoufflante d’une écriture saccadée et pleine d’images, à la limite des sortilèges, dans une ponctuation plus qu’aléatoire qui confère à ce récit une authenticité encore plus forte.
Ce n’est pas de tout repos mais c’est un livre incroyable.

Le pays des autres, de Leila Slimani


Un très beau roman, une fresque familiale et politique qui s’étend de la fin de la Seconde Guerre Mondiale à l’indépendance du Maroc.
Amine et Mathilde, continuellement tiraillés entre leurs histoires personnelles respectives, leurs héritages familiaux, culturels et religieux, leurs façons de voir la vie dans un contexte d’émancipation des femmes et de décolonisation où toutes les inquiétudes sont mêlées : avenir personnel du couple et avenir politique du Maroc, éducation catholique des enfants dans un pays en devenir, et majoritairement musulman, choc des envies, des rêves et des obligations…
J’ai toujours aimé l’écriture de Leila Slimani et ce livre ne fait pas exception. En revanche, je cherche encore le "suspense implacable" dont parle François Busnel
Hâte de lire Regardez-nous danser.

À qui la faute, de Ragnar Jónasson


Reconnaissance éternelle à mon libraire Du Vol dans les Plumes qui m’a fait découvrir Ragnar Jónasson il y a un an. Deux livres plus tard (Sigló puis le tome 1 de La Dame de Reykjavik), un grand merci aussi aux Éditions Lamartinière qui m’ont offert À qui la faute. Car c’est toujours aussi bien écrit, rythmé et palpitant. Dévoré en deux jours !

Désir noir, d'Anne-Sophie Jahn


Une enquête absolument remarquable, terrifiante et souvent révoltante.
Anne-Sophie Jahn ne revient pas "seulement" sur le meurtre de Marie Trintignant mais sur tout le système de clan qui entoure Bertrand Cantat, leader certes charismatique, mais aussi pervers narcissique qui aspire sous son emprise manipulatrice, non seulement les femmes qui partagent sa vie, mais aussi les membres de son groupe et de son clan, également qualifié par certains de ses proches de "mafia bordelaise".
Bien loin du grand n’importe quoi médiatique de 2003, Anne-Sophie Jahn revient sur les faits, rien que les faits (témoignages croisés, archives judiciaires et policières, correspondances et interviews) et démontre implacablement les dysfonctionnements, les contradictions et la procédure judiciaire et policière plus que discutable et douteuse, la complaisance de certains magistrats, qui ont fait suite à la mort de Marie Trintignant en 2003 et à celle de Krisztina Rády en 2010.
La force de son travail, c’est aussi de replacer cette enquête dans un contexte plus global de lutte contre les violences faites aux femmes depuis 20 ans, sur le renversement et l’inversion de la culpabilité, sur le traitement médiatique des féminicides qui étaient alors "seulement" vus comme des faits divers, des crimes d’amour ou passionnels et sur pourquoi et comment Bertrand Cantat incarne parfaitement la violence masculine, machiste et manipulatrice qui a coûté la vie à deux femmes : Marie qu’il a tuée à mains nues, Krisztina qu’il a tuée moralement et psychologiquement jusqu’à ce que, à bout, elle se suicide.

Laëtitia, ou la fin des hommes, d'Ivan Jablonka


Il y a quelques semaines, j’ai regardé la série "Laëtitia". Je l’ai trouvée passionnante (mais je l’ai déjà dit ici). En cherchant à en savoir plus, j’ai appris que la série était adaptée du livre d’Ivan Jablonka. Je me suis souvenu que j’avais acheté ce livre en 2016, à sa sortie, mais que je l’avais abandonné au bout d’une vingtaine de pages.
Je l’ai donc ressorti de ma bibliothèque et j’ai retrouvé le marque-page : un origami en forme de cœur, à la page 25.
J’ai évidemment repris la lecture depuis le début et je l’ai dévoré en quelques jours seulement.
Et je crois pouvoir dire que je n’ai jamais lu un livre pareil, qui traite de ce qu’on appelait alors un "fait divers" - nommé féminicide par l’auteur au chapitre 50 - en le replaçant dans une histoire globale de la France en 2011. Une histoire totale. Un travail titanesque d’un grand historien.

En vacances, Simone !, de Charline Vanhoenacker, Titiou Lecoq et Zoé Thouron


Sinon, j'ai aussi passé une partie de l'été à réviser grâce au cahier d'exercices féministes En vacances, Simone !, de Charline Vanhoenacker, Titiou Lecoq et Zoé Thouron, dont une partie des droits d'autrices est reversée à la Fondation des Femmes. C'est très drôle. Et heureusement qu'il nous reste l'humour parce que, passé l'éclat de rire, on aurait plutôt envie de tout cramer.

Et hier, j'ai attaqué Nos enfants après eux, de Nicolas Mathieu. J'étais passé à côté quand il a eu le Goncourt en 2018 et j'ai lu l'année dernière Connemara que j'avais beaucoup aimé. Mais comme tout le monde m'a dit que Nos enfants après eux était bien meilleur, je me suis laissée tenter. J'en ai lu 30 pages et j'aime beaucoup, pour l'instant. 

Et vous ? Vous avez lu quoi cet été ?

12 commentaires

  1. Ivan Jablonka, ça me dit quelque chose. Ah oui, il vient d'écrire un essai passionnant (dixit Télérama) sur JJG. J'ai lu le livre de Lola Lafon il y a qq temps, ardu mais passionnant, très documenté.

    J'ai beaucoup lu cet été :
    - Sous la dalle de Fred Vargas : très poussif, ennuyeux, pas très crédible. Très déçu.
    - Kérozène de Adeline Dieudonné (qui avait écrit le génial La vraie vie) : je te le conseille ! J'aime sa plume.
    - Dans les prairies étoilées de Marie-Sabine Roger (je te conseille Les Bracassées de la même autrice ou Bon rétablissement)
    - Et c'est ainsi que nous vivrons de Douglas Kennedy, dystopie plutôt bien ficelée
    et d'autres choses oubliables.
    Bon, faut que tu blogues plus souvent hein.

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  2. Ouais… je sais. Je suis vraiment une feignasse.
    Et puis chrome sur iphone qui ne veut pas me reconnaître quand je commente sur les blogs. Relou !
    Merci pour les titres ! Finalement, c’est une bonne idée, comme ça, je les retrouverais ici !
    Élo.

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    1. Je commente soit depuis le PC sous Chrome parce que Firefox est fâché avec mes identités Google, quoi que j'y fasse ; soit sur le téléphone avec le navigateur de Samsung qui a tout capté.

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    2. C’est quand même fou que mon chrome ne me reconnaisse pas sur iphone alors que Blogger et chrome, c’est Google quoi…

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  3. Personnellement, je lis ou relis depuis deux ou trois mois beaucoup d'écrivains femmes, surtout américaines et anglaises, de talents grands voire immenses. Mais comme, dans leurs romans, il n'est presque jamais question de viol ni de "violences conjugales" (quoique…), il est inutile que je rentre dans le détail, je pense…

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    1. Tout est dans le « quoique »

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    2. Je voulais dire qu'il s'agissait de violences plus subtiles que de franches beignes sur le museau... et qu'elles s'exerçaient aussi dans un sens que dans l'autre. Donc peu satisfaisantes pour une âme militante.

      DG

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    3. Détrompez-vous, la militante que je suis s’intéresse et accorde autant d’importance à toutes les formes de violences, t compris morales et psychologiques.
      Élo

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    4. Eh bien, écoutez, si un de ces jours il vous prend l'envie de lire de grandes romancières anglaises et/ou américaines, je reste à votre entière disposition…

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  4. Une grande romancière franco-américaine: Monique Wittig (Les Guérillères)

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  5. Désolé j'ai oublié de signer: Robert Spire.

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